Le Palais Sursock est une grande résidence de la ville de Beyrouth au Liban. Le palais, vieux de 160 ans, a survécu à deux guerres mondiales, à la chute de l’Empire ottoman, au mandat français et à l’indépendance du Liban. Cependant, la terrible double explosion du 4 août 2020, a lourdement impacté ce monument historique. Voici une brève histoire du palais Sursock.
Mélange de styles vénitien et ottoman
Achevé en 1860 par Moussa Sursock, le palais est l’une des plus grandes résidences du pays de l’époque ottomane. Il se situe dans la rue Sursock, où de nombreuses grandes villas et palais ont été construits depuis le début du XIXe siècle. Un siècle après sa construction, le bâtiment a été classé par le ministère libanais de la Culture comme bâtiment d’importance historique le 10 février 1966 (décret n° 60), grâce aux efforts de feu Lady Yvonne Sursock Cochrane.
Ce palais de trois étages, doté de quatre tours et de fenêtres à triple arcade, est entouré de vastes jardins. Il est à l’image de la famille qui a contribué aux collections d’art que l’on peut y trouver. Des meubles et des tapisseries français et italiens du XVIIe siècle, des tapis persans du XVIIIe siècle, des peintures inestimables de Gentileschi et de la verrerie byzantine trouvée en creusant les fondations du palais ne sont que quelques exemples de la richesse de la collection. Mélangeant les styles vénitien et ottoman, l’édifice est concentré sur un hectare et rassemble presque toute la flore méditerranéenne. Cette maison est un symbole de la riche histoire de la famille Sursock.
2 décennies de travail défaites en 2 secondes
Après la guerre civile de 1975-1990 au Liban, Lady Yvonne Sursock Cochrane a passé vingt ans à restaurer soigneusement le palais pour lui redonner sa gloire d’antan. La double explosion du 4 août 2020 a détruit cette merveille ottomane du 19e siècle, faisant exploser le toit en terre cuite et envoyant des milliers d’éclats de verre des fenêtres brisées à travers des œuvres d’art séculaires. Des statues de marbre d’une valeur inestimable se sont effondrées.
“Tout dans la maison a été très endommagé. Rien n’est resté intact“, a déclaré le propriétaire Roderick Sursock Cochrane à Al Arabiya English. “Une partie est récupérable, mais beaucoup de choses ont été irrémédiablement endommagées.”
“Nous devons sécuriser les murs et les fondations, réaligner les pierres qui ont été déplacées et poser des tuiles sur le toit. C’est beaucoup de travail“, a-t-il ajouté. “La partie la plus difficile sera les plafonds, je pense, car ils sont très complexes“.


Blessée lors de l’explosion, Lady Yvonne, 98 ans, est décédée peu après. Elle était une fervente défenderesse de l’art et du patrimoine, ayant été présidente du Sursock Museum et fondatrice de l’Association pour la protection des sites naturels et des bâtiments anciens (APSAD) en 1960.
“Dieu seul sait ce qu’il adviendra de cette propriété, entourée de plus en plus de tours ignobles (…) C’est encore le seul espace vert du quartier(…) Mais elle restera dans la mémoire de ceux qui l’ont connue, l’image d’une époque où la civilisation et l’art de vivre faisaient partie du quotidien.”
Lady Yvonne Sursock Cochrane (dans Palais Sursock Beyrouth, Préface de Yvonne Sursock Lady, par Dominique Fernandez, 2010)


Dans une lettre datée d’octobre 2020 adressée au ministre libanais de la Culture, les propriétaires actuels ont déclaré leur volonté d’entreprendre la restauration du palais et de ses collections afin de transformer la résidence privée en un musée ouvert au public. RestART Beyrouth apporte son expertise technique pour l’ensemble du projet et la collecte de fonds pour sa mise en œuvre.
La famille Sursock
La famille Sursock, à l’origine des marchands, avait acquis des terres et des entreprises une fois installée à Beyrouth au XVIIIe siècle et s’était élevée dans les cercles sociaux au point de se marier à l’aristocratie de nombreux pays européens. Le siège de la famille, appelé Palais Sursock, avait servi de rappel des jours de gloire de Beyrouth. Il abrite une impressionnante collection de meubles ottomans et de peintures européennes et constitue un trésor de l’histoire de Beyrouth. La famille Sursock est connue pour sa philanthropie. Elle a fait don de milliers d’œuvres d’art à l’État dans le cadre du musée Sursock de Beyrouth.